PÉPIN CAMILLE – Avant, pendant, et pourtant

Création : 31 mars 2025, écoles du quartier Hautepierre, Strasbourg
Commande et production : Les Percussions de Strasbourg
Effectif : 4 percussionnistes
Durée : 15’

Pièce créée dans le programme « MINIMAL ».

Avant, pendant, et pourtant est une œuvre pour quatuor de percussions. Conçue en trois mouvements, deux sections rapides encadrent un épisode lent. Le premier mouvement introduit une boucle répétitive et mécanique aux vibraphones. D’abord soutenue par les marimbas jouant avec archet, elle se complexifie et devient hypnotique. Un motif mélodique en émerge au fur et à mesure, voyageant entre les deux vibraphones en stéréo. Ce motif débute par une quinte ascendante et symbolise l’amour que l’on porte à quelqu’un. La texture se densifie grâce au déploiement des marimbas sur une plus grande étendue. Leur moteur rythmique s’étoffant également, ils emportent la matière vers un climax qui fait chanter le motif de l’amour. Les tensions s’apaisent progressivement, mais la douce nappe sonore qui en résulte s’éteint soudainement, comme si un évènement inattendu s’était produit. Nous changeons radicalement d’ambiance dans le mouvement lent. La sonorité mystérieuse des archets sur les lames en métal associée au bourdon des marimbas crée une atmosphère dépouillée et plus sombre. La quinte symbolisant l’amour est ici entretenue par le jeu des archets sur les lames en bois. Cela lui donne une texture fragile et vacillante et fait naître une sensation d’attente. Avec leur sonorité pure et éthérée, les vibraphones quant à eux semblent flotter au-dessus. Nous avons ainsi l’impression d’être suspendus au-dessus d’un vide inquiétant, face à l’inconnu. La fin reste d’ailleurs en suspens, énigmatique. L’apparition d’une pulsation régulière marque le début du dernier mouvement. À cette pulsation s’ajoute un motif au flux rapide et continu. Il va subir toute une série de variations qui confère à cet épisode son caractère dansant. Grâce aux contrastes des différents registres des claviers, j’ai souhaité explorer leur large palette de couleurs possibles. En faisant voyager les motifs d’un instrument à l’autre – parfois en changeant le timbre, parfois en utilisant le même mais alterné en stéréo – j’ai voulu jouer avec l’espace sonore. Le flux ininterrompu et la variété de couleurs et de contrastes contribuent à l’élaboration d’un épisode entraînant empli de surprises, mais surtout plus lumineux que les mouvements précédents. Vers la fin de la pièce, nous nous éloignons progressivement du caractère dansant. La matière se transforme de manière organique pour retrouver les éléments de la première partie et son climax. Ces éléments s’éteignent les uns après les autres pour finalement ne laisser entendre que la boucle hypnotique du tout début de l’œuvre. En nommant le dernier mouvement «Et pourtant», je souhaitais exprimer la possibilité de créer des moments heureux malgré l’évènement tragique de la section lente correspondant à l’instant où l’on apprend la maladie d’un être cher. Malgré les épreuves que la vie nous inflige parfois, des moments apaisés surviennent, emplis d’espoir, de lumière, hors du temps. Ce sont ces instants précieux qui comptent, nous inspirent et nous font avancer. Depuis toujours fascinée par les percussions, j’ai eu un immense plaisir à écrire cette œuvre commandée par les Percussions de Strasbourg. Elle a été l’occasion pour moi de mettre en valeur la virtuosité des musiciens de cet ensemble ainsi que la beauté unique de ces instruments.

Camille Pépin