DALLAPICCOLA LUIGI – Canti di prigionia

Création : 11.12.1941 à Teatro delle Arti, Rome
Durée : 25′

Titres des parties 
 Preghiera di Maria Stuarda 
– Invocazione di Boezio
– Congedo di Girolamo Savonarola

Luigi Dallapiccola, parlant de la genèse de ces trois parties des Canti di Prigionia (Chants de captivité, 1938-1941) a expliqué : « Le système dodécaphonique me fascinait, mais j’en savais si peu ! J’établis quand même une série de douze sons à la basse de l’œuvre entière et y apportai en contrepoint, en guise de symbole, un fragment de l’ancien chant de l’église « Dies Irae, dies illa » .

La série dodécaphonique (qui n’est pas la seule dans l’œuvre) est employée avec une grande liberté et génère un certain type d’harmonies où prédomine la quinte diminuée. Ecrite pour chœur mixte et un petit effectif instrumental réunissant deux harpes, deux pianos et percussions, l’œuvre occupe par son langage une position particulière : le diatonisme (du « Dies Irae » notamment et le dodécaphonisme y coexistent, deux univers radicalement différents sont confrontés en une situation esthétique exceptionnelle qui vaudra pourtant encore plusieurs réussites à Dallapiccola dans les années 1940. Le contrepoints progresse ici, comme d’autres paramètres, vers une certaine complexité et il contient souvent les éléments nouveaux du langage : la partie centrale des Adieux de Jérôme Savonarole est faite par exemple de canons sur trois « niveaux » dont l’un (celui concernant les instruments) revient pour ainsi dire sur lui-même en mouvement rétrograde. Les chants de captivité constituent l’une des œuvres les plus développées de Dallapiccola qui a repris plus tard des thèmes d’inspiration voisins dans Il Prigioniero et dans les Canti di Liberazione.
Pierre Michel.

Canti di Prigionia Chants de Captivité
– Preghiera di Maria Stuarda
O Domine Deus ! Speravi in Te
O care mi Jesu ! Nunc libera me.
In dura catena, in misera poena, desidero Te.
Languendo, gemendo, et genu flectendo,
Adoro, imploro, ut liberes me.
-Prière de Marie Stuart
O Seigneur Dieu ! J’ai mis mon espoir en Toi.
O mon cher Jésus ! Aujourd’hui libère-moi.
Dans mes dures chaînes, dans le malheur de ma peine, je Te désire.
En languissant, en gémissant et en fléchissant le genou, Je supplie, j’implore : 

– Invocazione di Boezio
Felix qui potuit boni
fontem visere lucidum
Felix qui potuit gravis
Terrae solvere vincula.
– Invocation de Boëce
Heureux celui qui a pu du Bien
Voir la source lumineuse,
Heureux celui qui a pu du poids de la Terre se libérer.

– Congedo di Girolamo Savonarola
Premat mundus, insurgant hostes, nihil timeo,
Quoniam in Te Domine speravi,
Quoniam Tu es spes mea,
Quoniam Tu altissimum posuisti refugium tuum.
– L’adieu de Jérôme Savonarole
Que l’univers m’écrase, que les ennemis se dressent contre moi, je ne crains rien,
Puisque c’est en Toi, Seigneur, que j’ai placé mon espoir,
Puisque tu es mon espérance, Puisque c’est Toi qui as placé si haut le refuge que tu m’ouvres…

Traduction du latin : Jean Barré